BOISE, Idaho - Contrairement à d'autres espèces, comme les mammouths, qui ont totalement disparu, l'élan est sorti relativement indemne de la période glaciaire. Et de nos jours, ce cervidé prolifère dans un nouveau paysage, modifié par la main de l'homme, qui lui a permis ces dernières décennies de quitter ses bastions isolés.
"Il y a 40 ans, l'élan était un peu exotique", observe Ed Mitchell, chargé de communication du Service fédéral américain de la pêche et de la faune (FWS) dans l'Idaho. "Ils se sont vraiment propagés depuis". Ainsi, il y a 200 ans, les trappeurs ne l'évoquaient que très rarement.
En 1939, l'Idaho comptait un millier d'élans (ou orignaux) de la sous-espèce Alces alces shirasi (élan de Yellowstone). L'Etat en dénombre aujourd'hui entre 15.000 et 25.000, soit bien plus que tout autre dans le pays. L'élan de Yellowstone vit dans les Rocheuses. A l'âge adulte, le mâle fait moins de 400 kilos, soit deux fois moins que le Yukon, un élan que l'on retrouve dans l'Alaska.
Les élans de plus petite taille sont moins sensibles aux hausses de température. Résultat, leur nombre a explosé dans la région. Le Wyoming en compte désormais 10.000, l'Utah environ 4.500, le Montana 5.000 et l'Etat de Washington un millier.
"Le nombre d'élans était probablement faible" il y a 200 ans, souligne Joel Berger, chercheur à la Wildlife Conservation Society, basée à New York, et professeur à l'Université du Montana. "Certainement pas aux niveaux que nous voyons actuellement".
Selon les experts, c'est l'exploitation du bois et le développement qui ont permis d'ouvrir de grands espaces et la pousse d'arbustes, aliment principal des élans. Dans le même temps, les prédateurs du cervidé ont largement disparu de ses territoires.
"Les dégâts sur l'habitat" de la faune sauvage "provoqués par l'industrie ont favorisé certaines espèces, dont font partie les élans", poursuit Joel Berger, qui a mené une étude pendant dix ans sur la population d'élans du Parc national de Grand Teton. "Et avec la disparition historique des grizzlis et des loups, jusque dans les années 1990, il y avait d'importantes zones de l'Idaho avec une bonne végétation et dépourvues de gros carnivores. Les élans se sont tout à coup retrouvés comme des enfants dans une confiserie", note-t-il...
L'orignal est un animal solitaire. Malgré une apparence étrange qui fait la joie des dessinateurs et des commerçants dans les parcs nationaux, il a développé des stratégies sans précédent qui lui ont permis de survivre à ses congénères pendant la glaciation. Les femelles mettent bas au même moment, mais éloignées les unes des autres, pour éviter que de trop nombreux bébés soient tués par des prédateurs, souligne Joel Berger. Et elles défendent leurs petits.
L'explosion du nombre d'élans est une aubaine pour les chasseurs qui en ont fait l'un des animaux les plus recherchés après le gros gibier. Mais les permis de chasse sont limités et, dans certains Etats, on ne peut tuer qu'une bête par personne pour toute la vie.
Dans les Etats où les loups et les grizzlis reprennent du poil de la bête, les biologistes s'interrogent sur le nombre d'élans qui en sont victimes. L'étude de Joel Berger rapporte que 2% des élans tués dans le parc national de Grand Teton ont été victimes de loups. Dans 15% des autres cas, ils avaient été attaqués par des grizzlis. Les autres sont morts de faim, ont été tués par des chasseurs ou ont été percutés par des véhicules.