VANCOUVER (AFP) - D'importants projets miniers et d'exploitation gazière dans l'ouest canadien, à la frontière américaine, inquiètent l'Etat voisin du Montana (Nord-ouest), qui craint pour l'une des dernières grandes régions sauvages des Etats-Unis.
Le Montana souhaite convaincre la province canadienne de la Colombie-Britannique de ne pas autoriser l'exploitation d'une mine de charbon et celle de gaz naturel dans la vallée Flathead, un territoire montagneux de 413.000 hectares partagé entre le Canada et les Etats-Unis, dont la portion américaine pénètre le Parc international de la paix Waterton-Glacier.
Selon les autorités américaines, ces projets auront pour conséquence le déversement d'eaux usées qui infiltreront l'écosystème de ce joyau naturel inscrit au Patrimoine mondial de l'Unesco.
Le projet de mine de charbon à ciel ouvert du groupe Cline Mining Corporation et l'exploitation du méthane de gisements houillers par le géant British Petroleum (BP) irritent les Américains.
"On nous assure que les procédures environnementales sont les mêmes que les nôtres. Mais soyons francs, nous n'en sommes pas convaincus", déclare à l'AFP Hal Harper, conseiller du gouverneur du Montana.
Les scientifiques craignent particulièrement les excès de nitrate, de sélénium et de sédiments nuisibles à la reproduction de l'omble à tête plate, une espèce aquatique protégée aux Etats-Unis. Ce poisson passe sa vie adulte dans le lac Flathead, au Montana, puis remonte une rivière sur 275 kilomètres et dépose ses oeufs en Colombie-Britannique.
"Nous ne déverserons aucun sédiment dans les rivières", assure Christopher Revington, vice-président de BP Canada pour le méthane extrait de gisements houillers. De nouvelles technologies permettraient, selon lui, d'exploiter le gaz naturel tout en minimisant l'impact sur l'environnement des 1.500 puits prévus.
Mais les écologistes n'en croient pas un mot. Ils craignent de voir la prolifération de gazoducs dans la forêt et de nouvelles routes permettant le transport de charbon, de matériel et d'employés.
Le passage de camions bouleverserait la vie des grizzlys dont le nombre au kilomètre carré est le plus important des montagnes Rocheuses. Selon l'organisation écologiste canadienne Wildsight, les ours deviendraient isolés et leur reproduction serait remise en cause à long terme.
Et c'est sans compter les conséquences nuisibles pour les lynx, loups, orignaux et wapitis qui vivent eux aussi dans la vallée et traversent régulièrement la frontière.
Ces craintes ne semblent pas perturber outre mesure la Colombie-Britannique. "Historiquement, des activités économiques ont eu lieu dans cette région et en particulier dans le domaine forestier", indique dans un courriel à l'AFP John van Dongen, ministre des relations intergouvernementales.
Environ 250 kilomètres de routes forestières existent déjà dans la vallée. Le ministre affirme cependant avoir pris en compte les inquiétudes du Montana avec qui la province a signé un accord environnemental en 2003.
Le développement économique de la vallée Flathead est néanmoins loin d'être acquis puisque les deux entreprises n'en sont qu'au stade préliminaire de leurs demandes de permis de construire.
"Nous attendons une décision du gouvernement qui nous permettra de poursuivre notre évaluation environnementale du projet", explique Gordon Gormley, vice-président exécutif de Cline Mining Corporation.
Ce retard rappelle une décision prise en 1988 par la Commission mixte internationale (CMI). Chargée de régler les conflits liés aux eaux limitrophes du Canada et des Etats-Unis, elle avait conclu à l'époque que la Colombie-Britannique devait abandonner un projet de mine de charbon proche du Montana, jugée trop polluante.